Attention objet théâtral non identifié ! envoûté par l’extraordinaire pouvoir d’évocation d’une écriture servie par une mise en scène à la fois sobre et vibrante de sensibilité, le chroniqueur ne peut que s’incliner.

Certes, la démarche d’Yves Robert est exigeante. Un cours d’histoire du 20ème siècle, en une heure et quart, et au théâtre de surcroît, voilà à priori de quoi décourager le spectateur ! Il aurait tort pourtant. Car cette pièce dont quatre représentations ont été données à l’ABC la semaine dernière, n’est pas un cours ex cathedra. Elle est faîte de chair et de sang, de rire et de larmes, d’amour de l’humain malgré tout, malgré ce siècle d’horreur sans fin, de la révolution russe à la guerre d’Irak, en passant par Hitler, Hiroshima et Dresde, qui n’ose se dire martyre, car ville d’un peuple entier confondu avec le régime bourreau.

Un rire vital
Dans ce fourmillement d’avanies, de petitesses, de grands massacres, un être se lève : Vladimir, personnage de fiction que deux comédiens s’attachent à nous rendre réel. Il finira comme chacun d’entre nous, par rendre son dernier soupir, mais en un lieu et des circonstances dont il ne faut rien dévoiler, sinon pour dire, peut-être, qu’ils portent la marque d’une tendre dérision et d’une fugace espérance.

La vie, c’est le rire de Vladimir, cet improbable fils d’un siècle gavé de sang, qui éclate, vital à la face du monde.

Les acteurs, Christine Chalard-Mühlemann et Samuel Grilli, servent avec ce qu’il faut de recul et d’engagement ce texte magnifique et dense qui fourmille de trouvailles narratives et de pieds de nez au destin.

Au bout du compte, au lieu d’être assommé, on ressort gonflé à bloc et rempli d’une certaine tendresse.